Le mardi 4 août 2020, suite à l’action menée par 5 associations dans le square Jules Ferry, à Paris, les jeunes ont été emmenés dans des lieux d’hébergement temporaires (hôtels et un gymnase du 11e), en attendant qu’un bâtiment qui pourraient les accueillir soit mis en état, mais surtout, que les négociations à leur sujet entre la ville et l’État aboutissent.
En effet, Magali Charbonneau, secrétaire générale de le préfecture d’Ile-de-France semble avoir du mal à comprendre le principe de présomption de minorité**. Alors Magali, stp, un petit effort, ce n’est pas très compliqué à comprendre, en fait : quand les parties en présence sont une personne qui se dit mineure et un département de l’une des 10 premières puissances mondiales, s’il y a une erreur qui porte préjudice à l’une des parties, on ne peut pas prendre le risque que ce soit un enfant qui subisse ce préjudice ! Simple, non ?
Cette présomption de minorité se trouve dans le droit français, au travers d’une tripotée de décisions de jurisprudence, ainsi que de la mention « le doute doit bénéficier à la personne », présente dans plusieurs textes (détails ici). Et tout ceci se base sur le fait qu’en novembre 1989, la France a signé la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE). Par l’article 3***, la France s’engage ainsi à reconnaitre la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant****.
Tu vois bien que si, sur une simple décision administrative, avant toute décision en recours, le jeune est traité comme un majeur, on prend le risque de traiter un enfant comme un adulte, que la présomption de minorité et l’intérêt supérieur de l’enfant ne sont alors pas appliqués !
Doonc… la question, ce n’est même pas de savoir si un dispositif d’accueil des jeunes leur garantissant leurs droits en tant que mineurs (prise en charge ASE, scolarisation etc …) se « justifie ». C’est juste qu’étant donné le bon sens de Madame Michu, le droit français et les engagements internationaux de la France, IL N’Y A PAS D’AUTRE CHOIX !
* le travail de Damien Rousseau sur le site de « The Ink Link », collectif BD engagé
** « L’Etat n’est pas favorable à la création d’un dispositif tiers car cela ne se justifie pas », Le Monde du 5 aout 2020. Le 4 août, elle avait même ajouté « tous ces jeunes ont été évalués majeurs » Espérons que cette phrase n’est plus dans l’article du 5, parce qu’entre temps, Mme Charbonneau a compris que tant qu’un juge des enfants n’a pas statué, ils ne sont pas définitivement « évalués » (C’est le Conseil d’État qu’à dit !) Rapport au fait que dans l’administration, parfois, ya des erreurs, t’sais ?… Ok, j’arrête les sarcasmes sur l’administration. Tout le monde peut se tromper, c’est bien pour cela qu’il faut s’organiser, pour que des mineurs n’en subissent pas les conséquences ! Ce qui serait top, c’est que d’ici quelques jours, Magali comprenne aussi le principe de présomption de minorité…
*** « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. »
**** Cela a d’ailleurs récemment valu à la France de se faire alpagué par l’UNICEF (bravo le pays des droits de l’Homme !)
Eté 2020 : action de 5 associations dans le square Jules Ferry à Paris
pour alerter sur la situation des jeunes laissés à la rue pendant leur recours devant la justice, afin de faire reconnaitre leur minorité
Le 30 juin, un campement d’environ 75 adolescents s’est installé dans le 11e arrondissement de Paris, square Jules Ferry. Ces jeunes se sont retrouvés sur le territoire français, sans adulte pour les accompagner, ils sont ce que l’administration appelle des « mineurs non accompagnés (MNA) ». D’après la loi, ils devraient être pris en charge par l’Aide Sociale à l’Enfance, mais au terme d’évaluations de minorité réalisées dans des conditions non conformes aux textes de loi (lire ici), ils ont été rejetés et se retrouvent à la rue.
Lire l’Odyssée d’Aly, remarquable présentation en BD, de la situation de ces jeunes
Médecins Sans Frontières (MSF) – bah oui, figurez-vous qu’MSF intervient pour une mission humanitaire en France… la mission MNA est même la seule mission MSF en France ! (hors urgence COVID) – le Comité pour la santé des exilé.e.s (Comede), les Midis du MIE, la TIMMY – Soutien aux Mineurs Exilés et Utopia 56 interpellent les conseils départementaux d’Ile-de-France sur les conditions de vie inacceptables des mineurs isolés étrangers Communiqué de presse du 30 juin 2020 – contacts presse
Mineurs isolés étrangers : un campement dans Paris pour rendre visibles des jeunes vulnérables, Aurelie Kieffer, France Culture, 1 juill. 2020
Plus d’infos :
Revue de presse du démantèlement du camp :
A Paris, l’avenir de jeunes migrants évacués de leur campement oppose la Ville et la préfecture d’Ile-de-France, Rey-Lefebvre pour Le Monde, 5 août 2020
Mineurs étrangers à la rue à Paris: victoire en vue pour les associations , Iban Raïs pour Médiapart, 4 août 2020
Paris : évacuation du camp de mineurs installé dans le square Jules Ferry, Julia Dumont pour InfoMigrants, 4 août 2020
MAJ 2 juill 2020, 6 août 2020, 9 sept 2021, 2 fév 2022